Le meurtre sauvage de Sophie Toscan du Plantier: l’ultime procès en 2016?
Depuis 19 ans, le meurtre de Sophie Toscan du Plantier, productrice de documentaires pour Arte, n’a jamais été élucidé. La France réclame toujours l’extradition du principal suspect I’Anglais Ian Bailey.
Le meurtre sauvage de Sophie Toscan du Plantier
Le 23 décembre 1996, Sophie Toscan du Plantier est retrouvée morte dans sa maison en Irlande à Schull dans le comté de Cork. E lle était venue travailler au calme sur un scénario et méditer, avant de rejoindre son mari le célèbre producteur de cinéma Daniel Toscan du Plantier pour les fêtes de fin d’année. Elle avait pour habitude d’y venir seule ou accompagnée de ses enfants. C’est une maison qu’elle avait achetée juste après son mariage en 1990 avec Daniel, décédé en 2003. Elle avait rêvé pendant des années d’acquérir une belle demeure dans les douces contrées irlandaises, à l’écart de tout.
Malheureusement une mauvaise idée lui prend d’ouvrir la porte à un inconnu en plein milieu de la nuit. Elle réussit à s’échapper dans la pénombre, mais est très vite prise au piège par les ronces. Son agresseur lui adresse le coup fatal en la frappant violemment d’un coup de parpaing alors qu’elle se débat à travers un fourré de fuchsias qui l’égratignent.
L’étrange journaliste Ian Bailey
Un étrange journaliste nommé Ian Bailey est chargé de l’enquête pour le ‘’Irish Examiner’’, un journal local. Au fil de l’enquête, le journaliste s’avère plus pertinent que les enquêteurs dans les détails et la description du crime. Les premiers soupçons se portent sur lui quand une commerçante, Marie Farelle, déclare l’avoir aperçu la nuit du crime dans les environs.
Ian Bailey n’est pas inconnu dans le village. Etrange personnage, sa fascination pour les rousses l’amène parfois à hurler à la mort comme un loup-garou devant les maisons de certaines femmes rousses du village les soirs de pleine lune. Ce qui a l’air de n’inquiéter personne. Passionné de mysticisme, traditions celtiques et poésie, les habitants du village se sont accommodés de l’étrangeté du personnage, qui vit aux crochets de Jules, une artiste peintre. Ivre, Ian Bailey se serait même vanté auprès des habitants du village des horreurs qu’il a commis: ‘’je suis allé la voir, elle s’est énervée, je lui ai fracassé le crâne’’.
Impossible extradition de Bailey
Trente témoins ont été entendus et plus de trois juges se sont succédé en Irlande et deux en France. Jugé non coupable deux fois par la justice irlandaise en l’absence de preuves, la France réclame l’extradition du suspect Ian Bailey en 2010 afin de le faire juger sous les lois françaises. Le juge d’instruction Patrick Gachon émet un mandat d’arrêt européen le 19 février 2010 contre le journaliste. Ce mandat permet de mettre à exécution des peines prononcées contre des condamnés qui se seraient réfugiés dans d’autres Etats de l’Union européenne.
Sauf qu’aucune peine n’a été prononcée contre Ian Bailey, qui s’est démêlé de toutes accusations en l’absence de preuves. Aussi, la Cour suprême irlandaise, faute d’un accord de réciprocité entre les deux pays, refuse la demande d’extradition en mars 2012. Marguerite Bouniol, la mère de Sophie Toscan du Plantier ne comprend pas ce retournement de situation, puisqu’en 2011, la Haute Cour de Dublin avait donné son feu vert pour livrer le principal suspect aux autorités françaises. «Nous sommes scandalisés. Notre fille a été massacrée et un assassin va rester libre et vivre sans être inquiété» ¹, dénonce-t-elle.
Aujourd’hui, un accord de coopération est en cours afin que la police française puisse fouler la terre irlandaise pour recueillir des informations et rechercher des indices. Malheureusement le jour du meurtre, le médecin légiste est arrivé sur les lieux du crime 36 heures après que le cadavre ait été retrouvé, ce qui a rendu impossible le moindre prélèvement ADN, ainsi que la connaissance de l’heure exacte de la mort de Sophie Toscan du Plantier. Environ 30 témoins pourraient être à nouveau entendus et un procès pourrait tout de même avoir lieu en France en 2015 ou 2016 malgré l’absence du principal suspect. Si ce dernier est condamné, la France relancerait la procédure d’extradition, sans la garantie que l’Irlande y réponde favorablement.
Pierre-Louis Baudey-Vignaud, un fils profondément meurtri par l’assassinat sauvage de sa mère
Pierre-Louis Baudey-Vignaud, le fils de Sophie Toscan du Plantier sort aujourd’hui de l’ombre en signant la préface d’un livre consacré à sa mère: « l’affaire Sophie Toscan du Plantier. Un déni de justice ». Âgé de 32 ans, il avait 17 ans quand sa mère a été sauvagement assassinée. Il entend bien honorer la mémoire de sa mère en allant jusqu’au bout du procès. Héritier légitime de la maison de sa mère en Irlande, Pierre-Louis Baudey-Vignaud est revenu y passer quelques jours: « C’est une racine importante pour moi, j’aime être là-bas. C’est là que je suis le plus proche d’elle, même si elle est tout le temps en moi » ²afirmait-il à l’époque. Mais dans le supermarché local, il reconnaît l’assassin de sa mère et s’en suivra un terrible choc qui le conduira à se battre et à accélérer le processus du procès pour que justice soit faite. La réalité en plein visage, il ne remettra plus les pieds dans la demeure et il attend beaucoup d’un procès qui devrait avoir lieu en 2015 ou 2016.
Ian Bailey, condamné à payer entre 2 et 5 millions de dollars à l’Etat irlandais en mai 2015
En attendant, l’association Assoph pour la vérité sur l’assassinat de Sophie Toscan du Plantier a été créée par la famille de la victime. Ce qui a permis en 2012 de porter plainte contre l’Irlande devant la Cour européenne de justice pour non-respect du droit communautaire, et de poursuivre des enquêtes en France.
De plus, en mai 2015, Ian Bailey a perdu son procès intenté contre la Garda (la police d’enquête irlandaise) pour mise en cause abusive et fausses allégations, et fut forcé à payer près de 5 millions de dollars de frais. L’espoir d’obtenir l’accord de l’Irlande pour la procédure d’extradition est donc toujours présent.