Florence Cassez, 7 ans de malheur
Presque 3 ans jours pour jours après sa libération, l’histoire de Florence Cassez reste encore dans toutes les mémoires. Pendant 7 ans, l’affaire va alimenter les chroniques judiciaires des deux côté de l’Atlantique. Côté français, tout le monde ou presque est convaincu de l’innocence de la jeune femme et dénonce une parodie de justice. Tandis que côté mexicain, on reproche à la France son ingérence. Alors que 2016 sera l’année du Mexique en France, voilà l’occasion pour nous revenir sur cette affaire qui a marqué durablement les esprits ainsi que les relations diplomatiques entre la France et le Mexique.
Lorsqu’elle quitte son poste de directrice d’une boutique de vêtement dans le Pas-de-Calais en 2003, elle ne s’imaginait pas à quel point sa vie allait être bouleversée. Bien sûr elle allait s’expatrier, rejoindre son frère au Mexique, ce qui en soit est déjà un bouleversement mais comment aurait-elle pu s’imaginer qu’elle passerait 7 ans dans des geôles mexicaines à clamer désespérément son innocence ?
8 Décembre 2005, la vie de Florence Cassez bascule
Tout commence en mars 2003 quand la jeune femme originaire de Béthune rejoint son frère installé à Mexico où il dirige une entreprise de distribution d’équipements médicaux. En octobre 2004, elle fait la connaissance d’Israel Vallarta qui se serait présenté comme un vendeur de voiture. Les deux ont une liaison jusqu’en avril 2005. À ce moment-là, Florence Cassez rentre en France pour quelques mois puis retourne au Mexique en septembre et s’installe de nouveau chez Vallarta, dans son ranch à Lac Chinitas.
Elle trouve alors un emploi dans un hôtel de Chapultepec, à deux heures trente de route du ranch de son ami. Elle déménage dans un appartement plus proche de son lieu de travail. Et c’est au cours de ce déménagement, le 8 décembre 2005, qu’elle est arrêtée en compagnie d’Israel Vallarta, les deux étant accusés d’enlèvement et séquestration.
Arrestation rejouée le lendemain en direct à la TV
C’est avant tout Vallarta qui est visé : les autorités le soupçonnent d’être le leader du gang « Los Zodiacos » et coupable d’une dizaine de rapts et d’un meurtre. Il s’agit d’un joli coup pour la police mexicaine et l’Agence fédérale d’investigation qui décident alors de rejouer l’arrestation du couple le lendemain, soit le 9 décembre, y ajoutant la libération de trois otages. Et tout cela à la télévision et en direct. Le tout étant présenté comme authentique.
Deux mois plus tard, le 11 février 2006, dans l’émission Punto de Partida, Florence Cassez dénonce le montage de l’arrestation en direct depuis sa cellule. Dans cette histoire, rien ne semble ni claire ni simple mais selon l’avocat de Florence Cassez et selon son frère Sébastien, Florence est victime d’un complot ourdit par Eduardo Margolis, l’ancien associé de Sébastien Cassez, les deux hommes d’affaires ayant eu des problèmes dans leur relation professionnel.
Calderon refuse le transfert en France
À la suite de cela, le 27 avril 2008, Florence Cassez est condamnée en première instance à 96 ans de prison pour enlèvement, association de malfaiteurs et possession d’armes. En appel, sa condamnation est réduite à 70 ans mais son transfèrement en France est refusé le président Calderon. Celui-ci ne veut pas se mettre à dos les électeurs, les affaires d’enlèvement étant particulièrement sensible (au Mexique, chaque année, plus de 8000 personnes sont kidnappées).
Tandis que les témoignages de soutien à la Française se multiplient, des failles commencent à apparaitre dans le dossier et le parquet mexicain reconnait, au printemps 2010 la mise en scène de son arrestation. Cette même année Florence Cassez dépose un recours en amparo (l’équivalent du pourvoi en cassation) tandis qu’un ancien ministre de la Justice du Mexique se déclare convaincu de l’innocence de la Française. La condamnation de Florence Cassez est néanmoins confirmée en février 2011.
Suite à cela, Nicolas Sarkozy décide de dédier l’année du Mexique en France à Florence Cassez, ce qui provoque l’un des plus sérieux incidents diplomatique de ces dernières années. Le Mexique décide alors de retirer son soutien à cet événement, ce qui conduira à son annulation pure et simple en mars 2011.
Violation de son droit fondamental en tant que personne de nationalité étrangère arrêtée
En ce même mois de mars, les avocats de Florence Cassez lance un ultime recours auprès de la Cour suprême du Mexique pour inconstitutionnalité. Moins d’un an plus tard, le rapporteur de la cour, Arturo Zaldivar, se prononce alors pour une libération immédiate et absolue de la Française estimant que cette dernière aurait subi une violation de son droit fondamental en tant que personne de nationalité étrangère arrêtée.
Pourtant un ultime rebondissement viendra semer le doute : en mai 2012, le frère de l’ex- compagnon de Florence Cassez, Mario Vallarta affirme que la Française prenait une part active aux enlèvements. Mais ce dernier coup dur n’empêchera pas la Cour suprême de voter pour la libération immédiate de Florence Cassez le 23 janvier 2013, elle arrivera en France dès le lendemain, reçue à l’aéroport de Roissy par le ministre des Affaires étrangère Laurent Fabius.
Après ces sept années de cauchemar, Florence Cassez a repris une vie normale, s’est mariée avec Fausto Avila, un Franco-Mexicain qui était l’un des piliers de son comité de soutien. Ensemble ils ont eu une petite fille, Fleur, née en février 2015.
Mais Florence Cassez a décidé de ne pas en rester là et s’est à son tour lancée dans l’arène judiciaire. Elle a porté plainte contre plusieurs personnalités mexicaines dont l’ancien président Calderon et l’ancien directeur de l’Agence fédérale d’investigation, réclamant 36 millions de dollars de dommages et intérêts. Une nouvelle bataille légale s’engage donc pour l’ancienne détenue mais le contexte et les enjeux seront sans doute bien plus supportables pour Florence Cassez.