Modernité, fluidité et lumière pour le futur Palais de justice de Paris
Le futur Palais de justice de Paris, situé porte de Clichy, quartier des Batignolles, dans le 17e arrondissement, devrait ouvrir ses portes au public au deuxième trimestre 2018 après quatre années de chantier. Le bâtiment abritera le tribunal de grande instance (TGI), le tribunal de police, les tribunaux d’instance, la direction de la police judiciaire (DRPJ) et la maison des avocats. Ce déménagement, envisagé depuis longtemps en raison de l’exiguïté des locaux de l’île de la Cité pour le TGI et du 36 quai des Orfèvres pour la DRPJ, a été tranché en 2009 par Nicolas Sarkozy dans le cadre du projet du Grand Paris.
Un bâtiment qui concilie ambition architecturale et développement durable
Le nouveau Palais de justice a été imaginé par l’Italien Renzo Piano, l’architecte du centre Pompidou. L’édifice est monumental : 160 mètres de haut (devenant le plus haut bâtiment de la capitale, après la tour Montparnasse et ses 210 m), 120.000 m2 de planchers, 38 étages, 90 salles d’audience, une capacité d’accueil de 2500 salariés et 8500 visiteurs.
Le bâtiment est composé de quatre éléments en verre superposés et ornés de jardins suspendus dont la forme effilée rappelle celle d’un paquebot à plusieurs ponts. Au rez-de-chaussée se trouve le « socle » qui accueille les salles d’audiences, et juste à côté, le « bastion » regroupant les espaces de détentions des personnes appelées à comparaître. Au-dessus du socle se trouvent trois blocs d’une dizaine d’étages, chacun donnant sur trois grandes terrasses arborées et recouvrant les services des magistrats du siège, du parquet et des présidences.
Les enjeux de développement durable ont été intégrés dès l’origine du projet et visent à conférer au futur Palais de justice un statut de référence en matière de consommation énergétique. Le bâtiment, qui vise à respecter le plan climat de la Ville de Paris, sera certifié HQE (haute qualité environnementale) et labellisé BBC (bâtiment basse consommation).
Les origines du projet « nouveau Palais de justice de Paris »
La question du déménagement du tribunal de grande instance (TGI) de Paris est posée depuis 1995. A l’époque, le principe du déménagement faisait consensus chez les acteurs politiques (État, mairie de Paris) dont les principaux arguments avancés étaient surtout le manque de place mais également le manque de fonctionnalité et de conformité.
Toutefois, malgré l’annonce de la nécessité d’un déménagement du TGI par le président Jacques Chirac le 10 janvier 2003 et la création d’un établissement public pour le Palais de justice de Paris (EPPJP), aucun accord n’a pu être trouvé quant au lieu des nouveaux locaux et deux projets de déménagement ont été conçus et tour à tour abandonnés.
Deux projets de construction abandonnés
Malgré le choix initial de l’EPPJP de favoriser l’extension du Palais vers l’Hôtel-Dieu, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, annonce le 25 janvier 2005, le choix de la ZAC de Tolbiac au sud-est de la capitale, face à la Bibliothèque nationale de France pour construire le nouveau TGI. Toutefois, le projet Tolbiac est abandonné en raison d’une forte opposition de Bertrand Delanoë, maire de Paris, qui fait connaître sa préférence pour le site de «Masséna Rives de Seine». Ce projet sera peu étudié par l’EPPJP en raison d’un terrain enclavé et mal desservi par les transports.
L’absence de consensus conduit à l’enlisement du projet jusqu’au 29 avril 2009, où le président Sarkozy, en accord avec Bertrand Delanoë, fait le choix du site de Clichy-Batignolles dans le cadre d’un discours sur l’édification du Grand Paris.
Remise en cause du projet et confirmation par le gouvernement
Dès l’annonce du projet de déménagement du TGI à Tolbiac ou à Masséna, des voix se sont élevées au barreau de Paris et l’association « La justice dans la Cité» a été créée en 2005 en vue de s’opposer au déménagement et défendre l’image symbolique d’une justice au cœur de Paris. En effet, pour l’association, des solutions alternatives au déménagement n’auraient jamais été sérieusement étudiées telles que l’extension du Palais de justice vers l’Hôtel Dieu. L’association intentera d’ailleurs un recours en annulation à l’encontre des différents contrats signés pour la construction du nouveau palais de justice.
En juillet 2012, le projet est remis en cause par Christiane Taubira, ministre de la Justice, et deux inspections sont mandatées pour réétudier le projet. L’aspect financier est en effet au cœur des préoccupations : en plus de la construction du bâtiment, l’entreprise Bouygues devra en assurer la maintenance pendant 27 ans soit 2,4 milliards d’euros qui s’ajoutent aux 575 millions d’euros de la construction. Finalement le projet est confirmé en janvier 2013 par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avec, toutefois, une renégociation du contrat.
Le projet du futur Palais de justice a suscité beaucoup de polémiques et se pose aujourd’hui la question de ses réelles motivations qui apparaissent architecturales et politiques notamment dans le cadre de la construction du Grand Paris.