Le débat du cannabis en France
La question de la légalisation du cannabis en France a commencé à émerger peu après 1968. Le sujet, souvent étouffé par la classe politique, ressurgit aujourd’hui en pleine actualité. Si l’idée d’une légalisation rencontre encore beaucoup de réserves, pour d’autres il s’agit de la meilleure solution pour résoudre les problèmes liés à la consommation de cannabis. Car la France en est le premier consommateur en Europe.
Selon une étude de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) publié en 2015, la France se situe au premier rang européen pour la consommation de cannabis. Près d’un Français sur trois en aurait usage au moins une fois dans sa vie. Une estimation en accord avec les analyses de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanes (OFDT), pour qui le nombre total de Français ayant expérimenté le cannabis serait en 2015 de 17 millions. Ils sont 4,6 millions à en avoir consommé durant l’année, dont 1,4 million d’usagers réguliers et 700 000 consommateurs quotidiens. Des chiffres éloquents qui témoignent de l’ampleur du problème tant du point de vue de la santé que celui du trafic de stupéfiants. C’est en effet sur ces deux versants de la santé et du trafic que se cristallise aujourd’hui l’opposition entre opposants et partisans de la dépénalisation.
20 fois plus toxique que la cigarette
Une étude menée en 2012 par des chercheurs néo-zélandais montrent que la consommation régulière du cannabis pourrait entrainer des pertes allant jusqu’à 8 point du quotient intellectuel (QI). En 2008, une autre étude établissait que le cannabis est 20 fois plus toxique que la cigarette. De plus en plus de données provenant de la recherche et du secteur médical font état de dangers liés à la consommation de cannabis. Risques cardio-vasculaire, cancers, troubles neurologiques tendent à augmenter significativement en cas de consommation régulière.
Loin de l’image de « drogue douce » véhiculée dans les années 70, le cannabis est un produit dont la dangerosité est maintenant avérée. Cette haute toxicité constitue pour les opposants à la dépénalisation un argument suffisant pour maintenir l’interdiction totale de la consommation. Et parmi ceux qui s’alarment d’une possible dépénalisation, on ne trouve pas forcément que les ligues de « morales et de vertus », comme on voudrait les caricaturer. Ainsi de nombreux médecins s’inquiètent de voir le jeune public accéder à une totale liberté de consommation. En effet, si la dépénalisation ne s’accompagne pas d’une augmentation significative du total des usagers, elle favorise néanmoins une consommation régulière. Or une consommation régulière précoce entraine des effets très lourds pour tout le développement futur de la personne.
« Un joint pour boucher le trou de la sécu »
Pour les partisans de la dépénalisation, il s’agit là d’une mauvaise interprétation du problème. En effet, l’interdiction n’a jamais empêché la consommation. La France est l’un des pays européens dont la législation sur la consommation et la vente de cannabis est la plus sévère. Une rigueur qui n’empêche pas l’offre de prospérer, comme le montrent les chiffres de la consommation. A contrario, la Belgique, l’Allemagne et l’Italie, qui tolèrent la consommation sous certaines conditions, comptent moins d’usagers du cannabis (en pourcentage de la population) que la France. Un constat qui pour les pro-légalisation montre l’absurdité de loi actuelle.
De plus, selon les partisans d’un changement de législation, la fin d’interdiction apporterait de nouveaux revenus à l’Etat. Le Colorado, où la consommation est autorisée, recueille ainsi près de 50 millions d’euros annuels de taxes liées à cette nouvelle activité commerciale légale. Pour Baptiste Créteur, consultant en stratégie, la France pourrait recueillir autour de 1,2 milliards d’euros annuels. Ainsi, selon les pro-dépénalisation, l’Hexagone disposerait de plus grands moyens pour renforcer sa politique de prévention. « Un joint pour boucher le trou de la sécu » ; « cannabis régulé, 100 000 emplois légalisés », tels étaient les principaux slogans de la marche mondiale pour le cannabis ayant eu lieu à Paris le 9 mai 2015. Enfin, les partisans d’une nouvelle législation, estiment que la fin de l’interdiction entrainerait une baisse probable de la criminalité. En 2010, l’OFDT dénombrait près de 122 000 arrestations pour ‘’usage du cannabis’’ et 15 000 pour ‘’usage, revente et trafic’’.
Pas de solution miracle
Une législation absurde pour les uns, un rempart pour limiter les risques sanitaires pour les autres… Le peu d’efficacité de la politique de répression donne raison aux partisans d’une dépénalisation contrôlée. Cependant, les risques de plus en plus importants sur la santé, mis en évidence par les études scientifiques, invitent à une très grande prudence. Il semble que d’un côté comme de l’autre on n’ai pas encore trouvé de solutions entièrement satisfaisantes.